Quand on a vécu autant de violence, on a un certain rapport à la douleur. J’ai un rapport ambigu à celle-ci. J’ai autant une hypersensibilité pire qu’un enfant qui demande des pansements au moindre petit morceau de bois invisible qui la touche à la plaie béante qui me laisse de marbre.
Le meilleur exemple est l’automutilation.
Je m’automutile depuis l’adolescence. Cela m’était mon père en colère. Parce que je ne me suis entaillé les poignets. Ce ne sont pas mes cuisses qui ont servi. Aucune lame, aucun, comme on se fait l’idée de cet acte. Que non, mon tatouage n’est pas de cet ordre.
Non.
Je m’en suis attaqué, comme un soldat à ma poitrine. Je n’ai pas utilisé de belle lame de rasoir tranchante. Je pincé chaque pore de la peau de mes seins comme on le fait avec les boutons noirs et blanc sur le visage. A chaque pincement de mes ongles. Il y a une petite substance blanche qui sort. Et à chaque fois, ça m’apaise. Parfois, c’est du sang. Alors je fais sortir le sang coagulé après. Puis arrive la plaie. Souvent, il y a une plaie qui reste plus longtemps. Je retire la croute.
J’ai des périodes sans, des périodes avec. J’ai 38 ans. Je le fais encore.
Quand je ne gère plus. Quand je déborde. Je recommence. Ma poitrine se crevasse. Elle est un champ de mine. Je cherche la sensation de douleur mais je n’ai que la décharge de bien-être
Ma poitrine au cratère de lune dégoutait mon père. Mais ça le faisait juste me mettre à 4 pattes. Au moins, il la tripotait moins.
La douleur est difficile à saisir, à comprendre, à appréhender. Je l’ai connu dans la violence, l’extrême, la fracture interne. Je la comprends mal. Elle m’effraie. Face à la douleur, j’ai 3 ans.
Ps : j’adore les vidéos sur YouTube où l’ont voit des gens faire les boutons… ça me donne une décharge similaire a celle que je vis quand je me le fais. Ça m’aide à le faire moins.