galeiliante_des_yeux_dun_homme_effraynt_une_foret_noir_86e7b521-aa2f-4002-98f5-c84ccc9ebe78
Picture of IronAnne
IronAnne

Dans ses yeux

 Ce texte est écrit par une personne présentant entre autre une dyslexique et dysorthographiques. La forte charge émotionnelle de cette écriture aggrave l’expression des troubles dys* de ce fait orthographe, grammaire et syntaxe sont affectées par l’exercice testimonial ici partagé.

Il est volontaire de ne pas faire corriger les textes. Les troubles dys sont des handicaps. Et oui, parfois … c’est difficiles à lire. Mais cela n’invalide pas le propos. Merci de (re)lire la notice dys*.

Je suis sur le trajet de retour du lycée. Mon corps est crispé. Je suis prise entre l’envie de regarder vers l’appartement où nous vivons ou d’ignorer la réalité. Je tente souvent de me rendre aveugle aux évènement à venir de sa violence.  Anticiper son humeur ou bien la découvrir sur le moment où j’ouvre les portes de l’appartement. Mais mon corps surpasse mes retenues et m’impose la clairvoyance de ce qui sera inévitable une fois dans l’appartement. Ma tête se redresse comme par réflexe et pointe vers la fenêtre de la cuisine. Pourquoi ai-je regardé ? Pourquoi toujours anticipé les risques ? Pourquoi ne pas me laisser porter ? Lâcher la lutte contre lui et pour la vie ? Pourquoi je tiens encore et toujours ? En un coup d’œil, je sais de tout mon être que je n’échapperai pas à sa colère. Je suis mal et j’ai déjà mal. Mon corps anticipe déjà chaque contraction défensive, et puis il frappe toujours au même endroit. Je crée une carapace entre l’extérieur et l’intérieur, une enveloppe de néoprène pour protéger ma psyché a défaut de pouvoir protéger mon corps. Ma peau m’échappe et échappe à ma conscience. Elle se veut quasi-imperméable. Il me faut accéder à un certain détachement de mes enveloppes. Il va frapper, je le sais. Ses yeux racontent la violence, la haine, le désir de destruction. Il est tors nu et prêt à en découdre. Il a besoin de se défouler. Je sais déjà qu’il n’aura besoin d’aucun prétexte, il a déjà décidé de m’assujettir à son script. Je sais qu’arriver sur le palier de notre étage, la porte sera déjà ouverte. Il sera là, avec son regard empreint d’une noirceur réfléchie, habité par une rage que je ne peux pas comprendre. Je ne comprends toujours pas comment il peut ressentir autant de violence, de destructivité. Si loin de lui aujourd’hui, je suis toujours dans l’incompréhension de la puissance qui l’habitais dans l’annihilation. Il ne me reste que 5 minutes tout au plus avant d’affronter le déferlement qui m’attend. Une liste s’impose à moi de ce que j’aurais pu faire qui pourrait nourrir le canevas de ce qu’il va m’infliger. Je suis sûre d’avoir rangé ma chambre, d’avoir débarrassé mon petit déjeuner et lavé ma vaisselle. Je n’ai rien laissé traîner. En ce moment, je fais tout pour passer sous ses radars, je n’ai pas le moral. Alors, je cherche à éviter d’être l’élément déclencheur. Il n’y a aucun courrier qui a pu venir de mon lycée.  Il a dû avoir un appel, une lettre le concernant ou concernant sa situation financière. Je suis irréprochable, mais c’est aussi ça le problème. Que faire dans son monde si les reproches ne sont pas au rendez-vous ?

Sur ces 5 minutes de trajet qui me séparent de lui, je passe en revue tous les scénarios possibles pour savoir de quoi je pourrais être potentiellement coupable. Parce qu’au final, je prends ce qu’il me donne, une responsabilité. C’est la prendre ou mourir. Mais je n’arrive à rien trouver. C’est en réalité plus facile de savoir pourquoi il va me frapper plutôt que de ne pas savoir et d’être dans l’inconnu. Parce que je peux m’en sortir avec des supplications. Une raison donne du sens à sa violence, même si elle n’en a aucun au fond. Mais, du haut de mes 16 ans, je cherche tous les moyens possibles pour tenir. Le sens fait tenir.

Ce jour-là, je n’aurais rien fait, et je n’aurais rien déclenché. Il était juste furieux pour une raison qui m’échappe encore et toujours. Je serais juste le réceptacle de sa fureur.

Les portes de l’ascenseur s’ouvrent, et il est déjà là, devant moi. Il porte un caleçon rayé d’un vieux bleu délavé et d’un blanc devenu jauni. Je ne vois que son torse nu et velu, et j’essaie d’estimer la rapidité de sa respiration. Cette vue me donne la nausée. Il ne m’évoque que du dégoût, un sentiment que je cache mais qui me fait encore avoir des relent de vomis dans le fond de ma gorge. N’a-t-il jamais su à quel point son simple aspect physique pouvait me révulser ? Peu importe. Il est furieux, et je n’ai rien fait pour provoquer cela. Cependant, le fait qu’il se tienne devant la porte de l’ascenseur est plutôt exceptionnel. Face à lui, je suis tellement terrifiée que je perds le contrôle. L’urine s’échappe de ma vessie dû à la terreur de la configuration de la violence qui se prépare. Je suis terrifié par sa noirceur. Il m’attrape alors que je n’ai même pas commencé à sortir de cet espace trop étroit et sans issue. Je ne suis qu’une poupée désarticulée sous ses gestes brutaux. Il fait de mon corps ce qu’il veut. Quand je vois des gens danser avec violence, moi, je ressens ces moments-là, ceux où il transformait mon corps en une poupée de chiffon sous l’emprise de sa violence. Les gens voient de la beauté dans ces temps dansé moi, j’y ressens l’impact sur le sol non consenti, la direction des coup impossible à anticiper.

Je vole contre la paroi de l’ascenseur, des murs du couloir, et je finis jetée sur le sol de la cuisine. Il est rare que ce soit aussi violent dès le début. Il a lâcher toute sa puissance. Il ne tiendra pas longtemps. Il a mis au point une chorégraphie de la violence. Je ne dois pas lui résister, sinon cela augmente sa rage. Mais ce midi-là, ce n’est pas le cas. Il est déjà à son maximum de brutalité. J’ai peur de la suite. Et en volant sur le sol du hall d’entrée, je me demande ce qui se passe. Ce qui a pu déclencher autant de rage et de fureur. C’est une pensée dérisoire, mais c’est la seule chose que mon cerveau arrive à faire. Pourquoi ? Une question éternelle. Pourquoi ne suis-je que son exutoire ? Pourquoi a-t-il tant voulu un enfant pour le haïr avec tellement de force ? Je ne comprends toujours pas.

Je crois encore aujourd’hui que trouver un sens à ses violences donne du sens à l’absurdité de mon enfance et de mon adolescence.

Mon corps est une boule de billard qui claque contre les murs et le sol de notre appartement. Il prend le temps de fermer la porte à clé. Le huis clos habituel s’installe. Aucune échappatoire. Il retire la clé de la porte. La mienne est au fond de mon sac, je ne pourrais jamais la chercher. Pourquoi n’y ai-je pas pensé en prenant l’ascenseur ? Je subis les ballets incessants de sa frénésie sans même penser que je n’ai pas le devoir d’en être une figurante. J’ai perdu l’espoir de fuir son opéra morbide. C’est déjà une période où je sais que la mort, la sienne ou la mienne, sera la seule possibilité de m’extraire de son musée. C’est l’heure de midi. Je n’ai qu’une heure et demie entre mon retour ici et le prochain cours. Il le sait. Il ne me frappe pas au visage. Il sait comment s’y prendre. Je vais devoir jouer la comédie d’un déjeuner heureux. J’ai la chance d’avoir un repas déjà prêt à mon arrivée.

Quand je fini par ramper sur le sol, il finit par voir que l’urine a souillé mon pantalon. Il en rigole, un rire déshumanisant, moqueur. Moi, avançant sinueusement sur le sol, je sens qu’il attrape ce jean au niveau des chevilles. Il me fait glisser sur le sol pour être proche de lui. Comme la poupée qu’il s’apprête à déshabiller Il me retourne comme une crêpe, tellement violemment que j’ai peur que mon bassin explose sous la torsion. Je me retrouve couchée sur le dos. Il est déjà au niveau de mes hanches pour retirer mon pantalon. Il le déboutonne et le retire en tirant depuis mes pieds. Je suis une vielle toile qui contient un sac de couchage trop à l’étroit. Je sens mes jambes se lever et mon pantalon qui glisse avec difficulté en raison de l’humidité. Il finit par arriver à me l’enlever et il m’arrache la culotte. Je me sens sale et humiliée sur le sol de la cuisine, et il me balance mes vêtements sur le visage puis se rapproche pour me les enfoncer dans le nez en me disant : “Tu n’es qu’un bébé dégoûtant et répugnant, une salope de petit pisseuse. “.

Il me laisse là sur le sol, dans une cuisine qui sent bon la nourriture, le visage sali par l’humidité de mon urine. Je me recroqueville sur le sol. Après un temps aussi long qu’une éternité mais sûrement très court en réalité, je me lève. Je me dirige le plus lentement possible vers la salle de bain pour mettre mes vêtements à laver et, au passage, je jette ma culotte dans la poubelle de la cuisine. Il va falloir me laver et finalement tout mettre tous mes vêtements dans le lave-linge. Puis, je vais aller le plus discrètement du monde dans ma chambre pour trouver d’autres habits. Je vais ensuite à table et mange. Il fera comme si de rien n’était.

Nous mangeons ensemble dans la cuisine dans un silence monacal. En débarrassant mon assiette et en jetant mes restes, je constate que ma culotte n’est plus dans la poubelle. Je vais retourner au lycée, heureuse à l’idée de finir à 18h ce jour-là. Ma mère sera rentrée et j’espère qu’il sera focalisé sur elle et non sur moi. Je vais avoir mal au ventre pendant deux semaines. J’aurai des hématomes sur le ventre qui vont apparaître après ce moment. Mais ce n’est pas quelque chose d’insurmontable. Finalement, les hématomes sont toujours présents quelque part.

Articles similaires

Partagez ce billet

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *