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IronAnne

Avoir mal

 Ce texte est écrit par une personne présentant entre autre une dyslexique et dysorthographiques. La forte charge émotionnelle de cette écriture aggrave l’expression des troubles dys* de ce fait orthographe, grammaire et syntaxe sont affectées par l’exercice testimonial ici partagé.

Il est volontaire de ne pas faire corriger les textes. Les troubles dys sont des handicaps. Et oui, parfois … c’est difficiles à lire. Mais cela n’invalide pas le propos. Merci de (re)lire la notice dys*.

Ce vendredi en thérapie, un gros morceau est tombé tel une évidence quand elle est dite mais qui renvoie à quelque chose de terriblement complexe. C’est un des gros nœuds du problème.

Je ne sais même pas comment l’aborder, en quelques mots. Y-a-t-il seulement les mots pour porter ce qui là en moi et dans ma vie. Mon thérapeute est formé à l’analyse transactionnel. Je ne vais pas vous donner un cours. Je vais simplement vous dire qu’on à tous un scénario relationnel de vie qui se rejoue encore et encore. Je pense qu’on est beaucoup à l’avoir expérimenté de vivre et revivre toujours le même type de situation.

J’ai grandi dans la douleur, la souffrance. C’est une évidence. Mon scénario relationnel, ce qui se rejoue chez moi est tellement clair, limpide. Je le comprends, le vois venir même si je ne sais pas encore bien me dépatouiller avec.

Je parler aujourd’hui de ces conséquences incommensurables sur ma santé, mais aussi de cette inaptitude à être correctement prise en charge. Parlons crument de la réalité parce qu’elle en a besoin. On la lit souvent avec des évocations lointaines parce que c’est compliqué.

  • Mon anus est un terrain en friche. Voilà près de 30 ans, enfin 28 ans que chier est une souffrance incommensurable. J’ai le sentiment que chaque fèces (mon caca quoi…), me donne l’impression de cisailler mon sphincter avec des milliers de lame de rasoir. Je ne peux pas chier en dehors de chez moi. Il me faut un sentiment de sécurité intense pour pouvoir faire caca. Je ne vous raconte pas ce que c’était difficile d’aller au WC pendant mes vacances. Reculer pour mieux sauter. Et y aller quand tout le monde dort… le cœur battant, la peur aux tripes. Souffler. Et puis ça fait 28 ans que je suis quasi continuellement constipé. Je sais que c’est lié aux sodomies. Je sais que c’est lié à la peur de l’intrusion. Je me souviens même de moi hurlant contre les suppositoires.
  • Ma digestion est souffrante. J’ai mal quand je digère. Il est facile de dire mon histoire est indigeste. Et chaque repas me le confirme. Saupoudré ceci de son assaisonnement fait de boulimie, d’anorexie, d’hyperphagie… et vous avez un fameux cocktail de douleur digestive. Et de rapport à ce qui fait fonctionner le corps bien complexe
  • Ma bouche… « Tout le monde a peur du dentiste » ma dit ma gentille médecin de famille. Elle est vraiment bienveillante. Elle n’a pas compris. Je n’ai pas réussi à lui dire devant ma fille de 4 ans que « non, je n’ai pas peur du dentiste, je suis terrifiée comme une enfant de 6 ans avec un pénis dans sa bouche ». Que oui, c’est plus facile d’avoir des infections dentaires que d’être soignée. Aucun dentiste n’a croisé ma route pour m’aider comme j’en ai besoin. Je vivais avec violence le simple fait que mes enfants dans leur toute petite enfance tentent d’explorer ma bouche avec leur mains curieuse découvrant le monde au travers de leur sensation. Ma bouche espace sacré que mon père a désacralisé, vandalisé avec son sperme. Il me faut plus qu’un Xanax, qu’un regard compatissant pour supporter un soin dentaire. Entendre, voir, tout est une horreur pour moi. J’ai accompagné mon ainé chez le dentiste. J’ai cru mourir rien qu’a tout voir. Ce n’est pas que j’ai peur qu’on me soigne les dents… j’ai peur qu’on aille dans ma bouche sans que je ne puisse avoir le contrôle de fermer… « gardez la bouche ouverte ». Il me faut une anesthésie générale pour en sortir et être enfin soigné. Pour d’autre, c’est l’absence de produit qui sera salvateur. On est toustes différentes.
  • Mes muscles, tellement de partie de moi souffre. Être à 4 pattes, c’est me faire enculer. Bouger est une horreur, je suis soumise bien souvent à la bonne volonté de mes enfants pour avoir à boire, un tric a grignoter. Je dois vivre avec ça. Tout est stratégie pour avance le rester du temps et ne pas montré cette difficulté.
  • Alors, évidement, j’ai plein de soucis vaginaux : cystite chronique, mycose chronique, douleur durant mes règles dont la variation témoigne de mon état émotionnel.
  • Évidemment, j’ai des soucis musculaires : douleur à l’épaule. Certes, je sais ce qu’elle dit de mon histoire. Elle est mon système d’alarme personnel. Le savoir m’aide à faire la paix avec et à mieux la vivre.
  •  J’ai constamment mal au sacrum. L’effleurer m’est terriblement douloureux.
  •  J’ai constamment mal aux ligaments, articulations…
  • Je suis ankylosée…

Je ne saurais pas tous lister. Mon corps a grandi dans les coups, les humiliations, les effractions. Il vit toujours coincé dans cette histoire. Il est toujours terrifié. Il à toujours 4 ans, 6 ans, 10 ans, 15 ans…

Je n’ai pas un peu mal. J’ai constamment mal. Je souffre chaque jour depuis 37 ans. On n’a pas de mémoire avant 6 ans, la puissance des traumatismes fait que, si un peu quand même. J’ai la mémoire de la douleur. C’est ma première mémoire. J’ai la clarté du souvenir de mon vagin pénétré par ses doigts de père curieux de son propre vice et ses yeux pétillant de plaisir.

Je suis à 8 sur l’échelle de douleur chaque jour. Quand je dis que j’ai mal, on est à 12/10.  Et je n’ai aucun anti-douleur. Parce que vous savez quoi ? Avoir mal, c’est tout ce qui m’a fait tenir, me rappeler que je suis en vie. Dans la révolution des fourmis, l’héroïne expose qu’en se blessant la cheville qu’elle prend conscience qu’elle est présente à elle parce qu’elle lui fait mal. Mon corps ne m’a jamais laisser oublier sa présence, son existence, sa complétude de lui-même parce que j’ai continuellement mal. Un corps absent, je ne sais pas ce que c’est.

J’ai eu à quelques reprises pris des dérivés d’opiacé pour un problème de santé qui m’obligerais à être constamment sous antidouleur. Je m’y refuse tant pour le risque d’être accros que parce que j’ai expérimenté ces trucs. Et j’ai découvert un corps qui ne fait pas mal du tout. C’est anxiogène et vous assure qu’effrayant n’est pas le terme. C’est la panique à bord. Je ne sais pas vivre sans ma douleur parce qu’elle est ce qui m’a maintenu en vie.

Alors on a un scénario de vie avec plein de chose relationnel mais il a aussi une dimension corporelle. Et aujourd’hui, j’ai pris ça dans la gueule. C’est vital, salvateur. Mais ça fait mal.

En octobre, j’ai pris rendez-vous avec une docteuresse spécialisé en gastro-entérologie. C’est la seule femme dispo dans mes dispos pour un rendez-vous sur mes jours de libre. J’ai le nom d’un gynéco. Si pour mon cul, j’ai besoin d’une femme. J’ai suffisamment bossé pour supporter un gynécologue masculin. Je cherche un dentiste qui m’aiderais en me soignant sous anesthésie générale. J’ai besoin d’un rhumatologue, et de surement d’autre spécialiste. Mais j’ai besoin de gens qui comprennent la nature, la délicatesse, le tact que demande mon histoire et la reconnaissance que cela n’est pas juste « le poids ». Mon obésité n’est qu’une conséquence et non la réponse à tout refus de soin.

La question est aussi de savoir si tout ces traumatismes n’ont pas déclaré une fibromyalgie, un SED ou tout autre chose. Car quelque chose est là. Comment le savoir ? Quel chemin de diagnostique faire ? Comment être prise en charge dans la nature de mon vécu sans les croyances populaire absurdes, les préjugés et le dénigrement de ce que c’est qu’être victime de presque 17 ans de torture. Ce n’est jamais « si grave » et j’aimerais leur prêter mon corps quelques heures pour qu’ils tentent de tester le poids du dénigrement. Voir un spécialiste des victimes de guerre ? Mais la guerre était une guerre de tranché dans un territoire bien caché d’une maison avec un général en chef et une secrétaire mi-victime, mi-bourreau, mais surtout complice… et une enfant outils déchiqueté

J’ai mal. Pas un peu. Tout le temps. Et j’en peu plus. Cela m’épuise.

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