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Le plaisir, le déplaisir, la compulsion

 Ce texte est écrit par une personne présentant entre autre une dyslexique et dysorthographiques. La forte charge émotionnelle de cette écriture aggrave l’expression des troubles dys* de ce fait orthographe, grammaire et syntaxe sont affectées par l’exercice testimonial ici partagé.

Il est volontaire de ne pas faire corriger les textes. Les troubles dys sont des handicaps. Et oui, parfois … c’est difficiles à lire. Mais cela n’invalide pas le propos. Merci de (re)lire la notice dys*.

I

Les viols ne sont pas de la sexualité, mais cela touche quand même par sa nature à la question sexe et colore le rapport à la sexualité.

Dans un sens pratique et au service de leur propre plaisir, tous mes agresseurs ont veillé à une lubrification des plus efficace de mon vagin. Mon père allant jusqu’à l’usage de lubrifiant souvent à base de silicone pour compenser la lenteur de mon corps. Parce que malgré les efforts, mon corps n’était pas aligné avec ce qui se passait, et la masturbation subit n’est pas la chose la plus efficace pour être glissante. Cela prenait trop de temps afin de s’assurer d’une bonne mécanique masturbatoire en fonction des pulsions de mon père.

Mon père a commencé très jeune à me masturber. C’était très déstabilisant à subir. Ressentir tout ce qui est associé au plaisir dans un déplaisir. Cela n’a pas été sans conséquence. J’ai déployé un comportement de masturbation compulsive. Je peux l’analyse, avec recul, dans un besoin d’entrainée mon corps à lubrifier plus vite, mais pas uniquement. Il y a un ensemble de sensation dans la masturbation et surtout quand le plaisir s’installe qui est agréable. Cela soutenait aussi le mécanisme dissociatif, partir dans les endorphines, ne plus ressentir le corps.

Mais cela inscrit le plaisir dans une certaine souffrance. Si je le dis souvent, il n’est pas rare de voir des victimes de violences sexuelles dans l’enfance se déployer du côté du plaisir sadomasochiste. Chez moi, cela ne se déploie pas dans une forme poussée, mais il me faut quand même en partir ressentir une certaine douleur. Mon système corporel a inscrit dans ses profondeurs qu’il y a un lien. Le viol n’est pas de la sexualité mais, on ne peut pas ignorer que c’est un acte qui colore quand même le comment celle-ci va s’installer.

Chez moi, il y a encore des besoins qui existent pour me faciliter l’endormissement, le calme, la gestion des états dissociatifs, la masturbation vient encore me servir de béquille. La jouissance intervient comme une libération des tensions et une possibilité de s’en défaire. Si c’est assez commun en tant que tel. Cela n’en reste pas moins particulier. Déjà, cela reste très « personnel ». Ce n’est pas dans un plaisir partagé. C’est très fixe sur un rituel qui s’est installé toute petite même si la façon de faire à changer. Petite, c’était sur une peluche que je pratiquais. À partir de l’adolescence, je me suis servie de mes mains. Sauf que j’ai pris appui sur ce que mon père me faisait. C’était un besoin pour m’extraire de ces sensations de déplaisir, de la douleur. Vers 13 ans, durant les viols, je m’occupais de me masturber pour tenir à ce qui se passait. J’ai très tôt découvert l’aspect multiorgasmique que la femme pouvait vivre. Et je m’en servais pour maintenir un état de déconnexion à ce que ma tête, mon être corporel me disait dans la souffrance. Je m’en servais pour faire un court-circuit.

Alors j’ai trouvé mon plaisir dans ce qui était insupportable. Cela ne le met pas dans un consentement, mais dans une stratégie de survie à l’insupportable qui se répétait sans cesse ?

Il y avait aussi une part d’entrainement, m’extraire de ce qui se passait vivre « mon plaisir » coupé de ce que je subissais. Et donc la masturbation compulsive, chaque jour me faisait l’effet d’être une sportive de haut niveau qui se préparait au subit à venir, prête à en découdre.

Il m’est encore difficile de ne pas anticiper la sexualité avec ce que j’ai vécu enfant et, puis-je en faire fi ? Cela fait 22 ans que je suis en sécurité et pourtant, ce sont des inscriptions archaïques qui ont lieu. J’ai une relation à la souffrance, dans un plaisir certain.

En pratique, tant que je consens, que je suis initiatrice de la demande : claque, attrapage de cheveux, sexualité brute (mais pas brutal), vulgarité vont venir soutenir un certain déploiement de la jouissance.  C’est un rapport encore très complexe que j’analyse.

La question de la pornographie. Mon père m’a exposé tôt à de la pornographie. Je ne sais pas quelle était son envie par rapport à cela, mais je sais que ça a coloré mon rapport à la pornographie. J’en ai parfois besoin pour couper des sensations qui m’envahissent et me plonger dans une représentation fantasmatique qui ne colle pas à mes pratiques. Il est important pour moi de parler d’un sujet, en toute pudeur. Sur les sites pornographiques, il est facile de trouver des mises en scène jouées, avec des acteurs, et facile a identifié comme tel qui mettent en scène des rôles père-fille, beau-père, fils, fratrie, ou mère/belle-mère-enfant. Si ces catégories sont vues beaucoup par des agresseurs, ils permettent de normaliser un fantasme qui n’a pas à l’être… elles sont aussi revues par des victimes. C’est parce que je l’ai dit : le viol n’est pas de la sexualité, mais il colore le rapport à celle-ci. L’accès au plaisir peut être coincé dans l’agression. Il n’est donc pas rare pour les victimes d’avoir besoin de soutenir des images de reviviscence traumatique pour jouir. Il serait encore plus facile de les blâmer. Il est moins facile de poser un regard compassionnel vers elles. Elles ne le diront pas, car c’est un tabou. Est-ce que je le fais ? C’est là que la question viendra peut-être au lecteur. Je suis consommatrice de porno. Mais lequel ? J’ai pu trouver mon juste compte dans les sites pornos féministes.

Je n’ai aucune honte du comment ma sexualité se déploie. J’ai subi beaucoup autour d’elle. Mon père a senti ma Pansexualité(qualifié de bisexualité dans le discours tout venant, même si la pansexualité définit mieux ce que je souhaite en dire). Il me l’a fait payer. Quand un pénis entre dans l’équation, quand bien même que je le l’apprécie, que je suis en couple depuis 22 ans avec la même personne. Il y a le besoin de cette dimension pour moi. Avec les personnes qui ont un vagin, cela n’a jamais été le cas. C’est simplement parce que je n’ai pas vécu la violence sexuelle des femmes de la même façon. Elle était connotée chez la maitresse de mon père et chez ma mère de la masculinité de mon père, de la crasse qui coulait dans sa vision du monde. Ma pansexualité n’est pas un espace où je me dévoile facilement. Il serait facile de mettre cela sur le compte ou mon père me traiter de perverse, un comble, non. C’est sur tout ce que l’induit : mon besoin de signifié à mes proches que je ne sois pas attirée sexuellement par eux. Parce que c’est ce que la société m’a apporté. Comme si je n’avais pas de désir, des attirances particulières ? Et bien si. Parce que c’est la nature des attirances, elles ont leurs couleurs propres, leurs reflets. Il y a aussi une position trop portée du côté de l’invisibilisation dans le milieu LGBTQ, elle y est souvent soutenue comme une forme d’indécision ou de traitrise… Même si on fait partie des « revendication », on reste en marge.   Elle connote trop mon présupposé désir. Et chez bien des hommes, hétéro, elle est l’espace de fantasme que je ne partage pas. Celui d’un homme avec deux femmes qui servent son plaisir. C’est une vision très hétéronormative dans lequel je ne me retrouve pas. « Moi, je rêve de me taper une mère et sa fille », ce n’est pas une réponse rare quand tu signifies ton orientation sexuelle. Yo ! on va se calmer tout doux les mecs cis avec ce type de désir… même adulte, l’inceste reste une réalité. Il est impossible pour moi de conceptualiser un inceste consenti. Parce qu’il existe toujours un rapport mère-fille très particulier et une confusion des rôles. Et puis c’est aussi mettre en jeu un rapport chez l’homme, même s’il n’est pas de la famille du côté du passage à l’acte incestueux. Être pansexuel, c’est entré dans un monde de silence. Les rejets sont multiples et nous mettent dans une zone blanche, celle d’un silence qui ne peut se dire. Comme si c’était « moins » grave, moins important. Toutes ces notions ont énormément joué dans ma façon de déployer mes relations et encore aujourd’hui, cela joue un rôle. Si je dis que je peux désirer d’autres genres que le mien, je veux tempérer en précisant « mais pas toi ». Je ne fais pas que porter cette croyance. Les personnes bi (pour vous simplifier l’accès, je vais dire bi) sont vues comme des succubes, des ferrures du sexe. Ben, ça peut l’être, mais cela n’a pas tant avoir avec les attirances qu’avec comment chacun éclot dans sa sexualité. Moi, je ne me m’y retrouve pas. Mais je suis bi, donc j’y suis mise. Je deviens un objet de fétichisation. Alors, j’ai appris à taire et à mettre sous le tapis ma sexualité.

Elle n’est pas simple ma sexualité, elle se cache, parce que je prends du plaisir dans une certaine douleur. Cela me met dans un rapport constamment ambivalent. J’ai beau savoir que cela s’explique du côté de la nature initiale de ma rencontre au plaisir, que c’est mon plaisir biologique, ici je l’assume, mais c’est un acte de foi envers l’humanité, envers ce que j’adresse au monde ici-bas sur ses lignes virtuelles.

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